Témoignages

Année #1, La Maison populaire

La Maison du parc du 02/10/2021 au 02/10/2022

Delphes

vendredi 22 avril 2022 à 19 h 51

« Cher toi,
Je sais que je devais t’écrire ce soir. J’aurais pu pré­pa­rer ce que j’aurais à t’écrire mais à quoi bon ?
J’ai tenu ma garde comme je m’étais enga­gée à le faire et j’ai pensé à toi qui veillait aussi sur ta caserne. Tu avais peur, tu ne vou­lais pas être là. À l’époque tu étais encore prêtre et l’habit t’avait épargné le front. Tu ne devrais qu’une chose : rejoin­dre les enfants du vil­lage et conti­nuer la classe avec eux en chan­tant. Quelle conne­rie, cette guerre. Pourquoi allez emmer­der ces pau­vres gens qui n’ont rien demandé ? Pendant que cer­tains se bat­taient, tor­tu­raient ou vio­laient des femmes, tu jouais au foot dans une rue de la grande Kabylie.
J’ai cru voir Alger la blan­che que je n’ai jamais vue, dans la blan­cheur irra­diante de quel­ques immeu­bles pari­siens. J’ai pensé au Maghreb et à celles et ceux qui allaient rompre le jeun quand je rom­prai ma garde.
Je l’ai fait. Je me croyais inca­pa­ble, moi qui ne tiens pas en place, moi qui gigote sans cesse. Comme quoi, tout est pos­si­ble. J’étais dans les faveurs du ciel, auréo­lée par un rec­tan­gle lumi­neux. Un cadre me pro­tège, le garde, garde la ville qui va s’endor­mir dou­ce­ment. Nous sommes reliés, ensem­ble, à l’infini, qu’on le veuille ou non.
Prends soin de toi et dis bon­jour aux enfants. »

Delphes

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